Entreprendre,  Où cours-je ?

Entreprendre (et en vivre) et ralentir, mission impossible ?

ryan-johnston-124209-unsplashVoilà la question à laquelle j’essaie de répondre depuis plusieurs semaines.

J’ai lu des tas d’articles sur le slow entrepreneuriat – mais peu font référence au slow entrepreneuriat dans le domaine de la création… Car autant il est plus facile pour un consultant de réduire son nombre d’heure et de trouver des prestations qui se vendent toutes seules (programme de formation en ligne etc…) autant pour un entrepreneur artisan, c’est plus compliqué !

La réponse personnelle que j’ai trouvée m’a poussée (entre autres raisons) à choisir un retour au salariat (séance de rattrapage par ici…)

L’équation : prendre son temps pour faire ce qu’on aime sans saturer ou se lasser, mais facturer suffisamment pour dégager une marge significative (et donc un salaire représentatif du travail et de l’énergie déployée) me paraît définitivement impossible à résoudre. Surtout dans l’artisanat et la création. Ou alors il faut se placer sur le marché du luxe et facturer ses heures de travail bien en dessus du prix du marché “classique”. Et ça, je ne m’y résous pas et surtout, cela activerait encore bien davantage mon syndrôme de l’imposteur !

Je vous épargne les calculs savants que je me suis amusée à faire, avant de définitivement choisir de reprendre un job. Mais pour faire simple : en redevenant salariée à temps partiel, je vais gagner en 3 jours et demi, ce que je pourrais gagner en salaire net en travaillant 6j/7 en tant qu’entrepreneur-artisan (les mois où tout se passe bien et le planning est rempli !) Moi qui ressens depuis quelques mois un grand besoin de ralentir, et d’avoir un rythme de vie qui me permets de développer des projets personnels, et qui me laisse suffisamment de temps pour me consacrer à autre chose que mon entreprise, vivre comme je l’entends, le calcul a été vite fait.

C’est un leurre, d’après-moi de dire que l’entrepreneuriat permets une certaine liberté dans son emploi du temps. En effet, on a le loisir de prendre une journée off quand on veux, et travailler à n’importe quelle heure même à 1 heure du matin si on le souhaite pour rattraper les temps de repos, mais pour développer un chiffre d’affaire suffisant pour gagner sa vie, il faut quand même tenir un certain rythme. Cette course effrénée m’a épuisée ces derniers temps. Ces 3 derniers mois ont été les plus intenses je crois depuis 2 ans. Je pensais en retirer du plaisir et de la fierté et de la reconnaissance : celle de me verser un vrai salaire enfin, sur mon compte personnel. Cela n’a duré qu’un temps. Très vite j’ai compris que ce n’était pas mon rythme naturel et que les quelques misérables centaines d’euros versées sur mon compte étaient loin de représenter l’effort consenti (et on a beau dire qu’il y autre chose en contrepartie, être son propre patron, gérer son emploi du temps comme on l’entends, cela ne suffit pas pour apporter la reconnaissance nécessaire à tout être humain normalement constitué…) Alors que j’atteignais enfin mes objectifs de chiffre d’affaire mensuel que je m’étais fixés depuis 2 ans je perdais en motivation et en plaisir !

Résultat, après 3 mois marathon, je suis au bout du rouleau. J’en ai plein le dos et il me le fait savoir !!! Le peu de journées off que je me suis octroyées n’ont pas été si bénéfiques, car je ruminais au fond de moi de tout ce boulot qui m’attendait et n’avançait pas. Résultat, je finissais ma journée de repos déprimée, découragée, me sentant coupable ! Et le lendemain matin je n’en avais pas plus de motivation pour m’y remettre, découragée d’avance pour tout le travail qui m’attendait… Sans compter ma casquette de maman, et de bénévole au sein de plusieurs associations. Le cumul de tout cela me fait frôle le burn out en ce moment. Je suis une maman exécrable, une épouse absente, et enfin personnellement, je broie plus souvent du noir que je ne diffuse de la lumière et de la joie autour de moi.

Ma créativité en souffre clairement. J’ai beau avoir quelques idées, je n’arrive pas à prendre le temps de travailler dessus, de les développer. L’énergie que le travail “facturable” me demande ne m’en laisse que trop peu pour concrétiser mes idées et mes envies ! Et en fait, je n’ai même plus envie de développer mes idées ! Quelle frustration pour une créative !

Pour m’aider dans ce choix, au-delà des calculs mathématiques, je me suis posée une question simple : Qu’est-ce qui me mets en joie dans ma vie en ce moment ? Et en ce moment ce qui me mets en joie c’est d’avoir une vie alignée avec mes convictions personnelles : une sorte de vie décroissante – Revenir à une vie simple, mais à mes yeux saine et équilibrée : faire un maximum de courses chez les petits commerçants (ce qui nécessite d’avoir du temps, car on papote beaucoup chez ses commerçants préférés LOL), prendre le temps de me déplacer en vélo, prendre le temps d’aller flâner à la médiathèque avec les enfants, sans avoir l’œil sur la montre, cuisiner frais et varié, aller chercher les enfants à l’école à pied, traîner sur le chemin du retour, arrêter de les stresser en leur criant à longueur de journée et de soirée : “dépêches-toi”. Prendre le temps de discuter avec eux de leur journée, de leurs réflexions… les accompagner vraiment dans leurs émotions, dans leur croissance et dans leur développement personnel. Et poursuivre mes engagements bénévoles qui ont un vrai sens pour moi, et qui représentent à mes yeux la vraie meilleure façon de changer le monde !

C’est pour cela que j’ai pensé que le salariat à temps partiel serait une bonne solution. Parce que je me suis dit qu’au moins, le temps qui me resterais, je pourrais vraiment choisir d’en faire ce que je veux; voire de ne rien en faire sans craindre pour mon compte en banque !

Je vais donc ralentir. Enfin à partir d’octobre, car avant, il va y avoir une période de transition ou je vais honorer quelques prestations en parallèle de mon job. Mais j’aspire à ce moment ou je n’aurais plus aucun engagement pour ma petite entreprise et ou je pourrais me poser si je le souhaite régulièrement dans la semaine, pour reprendre la guitare, pour aller sur un coup de tête au cinéma sans culpabiliser, pour faire une grande sieste à l’ombre de mon mirabellier, ou passer une après-midi à écrire, coudre, bricoler, créer sans penser à tout ce qui n’avance pas et à l’argent qui ne rentre pas pendant ce temps.

Je voudrais finir ce long article par une citation de Cyril Dion… Elle peut être interprétée comme bon vous le semble, mais cette phrase intervient dans son livre au moment il il évoque l’idée d’un salaire minimum universel… Cela me fait beaucoup réfléchir en ce moment

“Imaginez si l’ensemble de l’énergie créative et productive des personnes qui travaillent chaque jour sur la planète n’était pas concentrée à faire tourner la machine économique, mais à pratiquer des activités qui leur donne une irrépressible envie de sauter du lit chaque matin, et que cette énergie soit mise au service de projets à forte utilité écologique et sociale… il y a fort à parier que le monde changerait rapidement !”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *