Journal d'un confinement,  Où cours-je ?

2ème week-end confinés. On craque !

La journée de vendredi a été compliquée. Pour tout le monde. Seule Camille s’en est à peu près bien sortie. Gaspard a beaucoup râlé, pleuré, résisté à l’école à la maison. Mais je ne veux pas lâcher là-dessus, il n’est pas assommé de travail et quand il se concentre, on en a pour 2h à peine de travail (3 à 4 séances de 20/25 mn.) Cette semaine on a clairement laissé tomber les tickets, car cela nous mobilisait beaucoup d’énergie tout au long de la journée, lancer le chrono, vérifier, rappeler à l’ordre qu’il fallait aller dans le jardin etc… On a préféré instaurer des routines. Le matin c’est travail scolaire, avec une pause toutes les 25 minutes environ. Comme ça à midi, tout le travail de Gaspard est plié et je peux me consacrer davantage à Camille et à mes tâches/envie à moi. Et les enfants sont libres de jouer dehors, de regarder un peu la télé. Bruno a procédé de la même façon. Cela donne aussi de meilleurs repères aux enfants qui je crois en ont profondément besoin pour se sentir en sécurité. On peut ainsi un peu mieux savoir quel jour nous sommes, car chaque journée à ses rituels propres et ses repères spaciaux-temporels.

Mais ce vendredi est un peu étrange point de vue émotions. Je m’énerve pour un rien. Le pompon c’est le vendredi soir, entre 17h et 19h. Zéro patience. Je ne rêve qu’une chose qu’ils soient couchés. J’ai pu sortir un peu pour aller chercher notre panier de légume. Sortir me fait un bien fou, mais cela reste des sorties utiles en voiture. Alors histoire de prendre l’air, je profite de la douceur de la météo pour ouvrir en grand les fenêtres de la voiture et pour mettre un peu fort la musique. Ce sont les riverains qui doivent se demander ce qu’il se passe !

Samedi et Dimanche c’est pas mieux ! Samedi matin, nous n’avons rien à faire contrairement à d’habitude puisque nous nous sommes arrangés pour faire les courses jeudi et vendredi. Je traîne au lit jusque 10h à lire, et rêvasser.

Le reste de la journée s’écoule dans un drôle de désœuvrement général je crois. Les enfants sont intenables et n’arrêtent pas d’entrer et sortir, nous gueulons à chaque fois, car ils oublient de fermer la porte au passage, laissant rentrer le froid dans la maison. Nous profitons des rares moments où ils sont dans leur chambre pour savourer le calme ! Je dessine pas mal. Joue sur le téléphone.

Samedi soir nous organisons notre soirée cinéma. Nous avons décidé de faire découvrir Un Indien dans la Ville aux enfants. C’est drôle comme la situation de Thierry Lhermite dans le film fait écho à l’actualité d’une certaine manière et combien la confrontation entre deux mondes me paraît tellement à propos en ce moment. Lorsque je l’avais vu j’avais surtout regardé ce film avec mes yeux d’ado et c’est les histoires d’amour qui m’avait marquée… Aujourd’hui c’est le regard critique sur notre société libérale & capitaliste qui me saute aux yeux. A chaque âge sa lecture d’un même film !

La nuit de samedi à dimanche est chaotique pour ma part. Nous avons changé d’heure. Je suis réveillée à 5h du matin par les rafales de vent qui sévissent depuis hier soir. Je me demande si l’on a bien pensé à ranger les trucs dans le jardin, si ça va pas faire des dégâts. Puis je pense tour à tour au travail, que deviendra l’entreprise pour laquelle je travaille si la crise durait ? Et celle de Bruno ? Tiens il se mets à ronfler. Je le pousse du coude pour le faire bouger. Il se retourne. Et puis je me repasse dans la tête la liste des choses que je DOIS faire depuis plusieurs semaines et qui me saoulent… régler la question de mon assurance professionnelle, déclarer le chiffre d’affaire de février, envoyer le devis de mon dentiste à ma mutuelle… Bref, dans ma tête ça n’arrête pas, mais les heures ne passent pas plus vite sur le réveil ! 7h, je ne tiens plus, je me lève. Même si je suis seule, dans le silence de la cuisine, je me confine dans la douceur de la capuche de mon sweat-shirt, et je me prépare lentement un café, tout en scrollant les nouvelles de la nuit sur mon téléphone. Les enfants descendent. Trop tôt à mon goût. Je ne finirais pas mon petit-déjeuner en paix. Et ça, cela n’arrange rien à mon humeur exécrable de ce dimanche matin ! Depuis le début du confinement, j’avais gardé le moral, le sourire, et malgré quelques passages à vide furtifs, je n’avais jamais éprouvé d’agacement à ce point là envers les enfants.

Je me réfugie dans la salle de bain pour prendre une bonne douche. Quand je sors, je mets un peu de musique. Celle qu’on écoute souvent au boulot. Et là j’ai les larmes qui pointent leur nez. Le travail me manque. Vraiment. Mes patrons me manquent. L’ambiance, la coopération, la créativité. Les mains dans la terre, les plantes, les couleurs, les odeurs. Les déjeuners à rire, à échanger des bonnes recettes. Je leur envoi un petit message. Nous essayons de maintenir le lien, on s’envoie des blagues, ils me racontent quand ils font des choses pour l’entreprise ! Mais cela n’a rien à voir avec ce qu’on peut vivre ensemble au quotidien.

Les médias commencent à parler du manque de certains médicaments nécessaires en réanimation. Ils disent que ça y est la vague est en train d’arriver, les trains sanitaires, les hélicos évacuent les malades dans les hôpitaux de province moins touchés. De plus en plus de témoignages poignants de soignants sont accessibles dans les médias. Une ado de 16 ans est décédée. Aujourd’hui je suis triste. Vraiment. Que va devenir notre monde ? Cela me hante une bonne partie de la journée. Je sais que la tristesse est le cap par lequel nous devons passer. C’est ce cap que nous franchissons quand le cerveau a digéré la fin de quelque chose, et que nous en prenons tout doucement conscience. Je ne sais pas la fin de quoi c’est. La fin d’un monde sans doute. La fin de mon monde insouciant à moi. Et si mes employeurs ne pouvaient pas refaire démarrer la boîte après tout ça ?! Et si Bruno perdait son boulot ? Et si nous étions dans l’impossibilité de rembourser la maison ? Et si l’économie s’effondrait complètement. Angoisse et Tristesse ne me quittent pas de la journée. Le manque de sommeil n’aide absolument pas. Les enfants heureusement sont à peu près calme. Temps d’écran illimité aujourd’hui. J’ai trop besoin de calme et qu’on me laisse tranquille !

Bruno s’énerve très fort à midi parce que Gaspard négocie encore une fois pour ne pas mettre le couvert. Il craque. J’en fait également les frais quelques minutes plus tard, sur la base d’une incompréhension entre nous quelques minutes avant le repas, une histoire de cuisson de riz. Cela a été d’une extrême violence pour moi, surtout avec mon état d’esprit du moment. Pas besoin de ça. J’ai envie de quitter la table avec mon assiette et d’aller manger seule dans une autre pièce. Je reste. Et je dit ce que je pense.

S’ensuit une après-midi sans parler ou presque. Je suggère à Bruno d’aller faire un tour avec Gaspard, dans le quartier, en trottinette. Histoire qu’ils s’aèrent et prennent un peu de bon temps tous les deux. Ils rentrent et jouent ensemble au mille bornes. Gaspard sera suite à ça un tout petit peu plus gérable.

Je passe mon après-midi à dessiner. Je n’arrive à faire que ça. Pas le courage de m’attaquer à autre chose. Je sais que cela ira mieux demain ou après-demain, après une bonne nuit de sommeil et après avoir digéré et accepté d’être triste.

Ce dimanche soir après le repas j’ai envie d’aller au lit direct. Et puis finalement, je tombe sur un entretien avec Alexandre Astier sur les exo-planète. J’enchaine sur le visionnage de son Exo-conférence en engloutissant une tablette entière de chocolat blanc. Loupé pour une heure de coucher raisonnable. J’éteins la lumière, il est minuit passé, mais je suis contente de ma soirée et j’en sourirais presque dans mon sommeil, alors qu’il m’attrape dès que j’ai posé ma tête sur mon oreiller.

Bilan du week-end :

  • Ecole : Vendredi aura sans doute été une des pires journées !
  • Enfants : des vraies piles électriques !
  • Parents : on craque !
  • Nombre de carré de chocolat consommés : beaucoup trop !
  • Nombre de verre d’alcool consommés : 3 (un par jour…)
  • Sortie à l’extérieur : 1 pour Bruno, 1 pour moi !
  • Moral : 5/10 de moyenne !
  • En résumé , Craquage en bonne et due forme !

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